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« J'espère que le fond de la mer est étanche | Page d'accueil | On l'a entamée ce matin au petit-déjeuner »

samedi, 25 octobre 2008

Pourvu que cela ne m'arrive jamais...

Que se passe-t-il dans la tête d'un adolescent qui accuse son prof de violence ou d'attouchements en sachant pertinemment que c'est un mensonge ?

Quelle est l'influence de la judiciarisation et de la médiatisation de certains faits-divers comme celui de la gifle donnée par un enseignant à un élève dont les parents portent plainte immédiatement et obtiennent gain de cause.

Les média se font nettement moins écho des erreurs, des accusations mensongères qui ont pourtant déjà été la cause de suicides d'enseignants.

Que se passe-t-il dans la tête des policiers qui arrêtent et mettent en garde-à-vue des enseignants sur la seule accusation d'un enfant ? J'ai en tête au moins trois faits-divers. Un prof de français arrêté et menotté en plein cours au collège parce que des parents l'accusaient d'avoir fait lire un livre prônant la zoophilie à leur enfant. S'en suit garde-à-vue, perquisition au domicile du jeune prof de français, annonce sur les radios et télés nationales que ce jeune prof possédait des revues et de la littérature pornographique et érotique ! J'espère que ce jeune collègue va bien. Il s'est avéré quelques jours plus tard que le livre d'Agosta Kristof était une lecture conseillée par le ministère ! Un prof de gym est accusé d'attouchements. Il est averti par son principal, convoqué pour confrontation avec l'élève et sa famille qui ne se présentent pas. Impossibilité de confrontation, le principal renvoie immédiatement l'affaire au procureur de la république. Le prof se suicide.

Aujourd'hui dans l'Aisne, des profs doivent se sentir bien trahis, tristes et en colère. Ils savent que si ça leur arrive, ils ne pourront que compter sur leurs réserves personnelles d'énergie, de capacité à résister à l'humiliation et au mensonge. Ils n'ont pas intérêt à être un peu malade cette semaine là, ou à avoir été ou être encore dépressif. Selon le procureur de Laon, "il est "téméraire" de privilégier un lien de causalité entre les accusations de l'élève et le suicide de l'enseignant." Ben oui, quoi, il était en instance de divorce. Donc, si vous prenez des anti-dépresseurs, si vous divorcez ou vivez quelque autre traumatisme, ne le dites surtout pas. Cela pourrait se retourner contre vous en cas d'accusation mensongère ! Les accusations, c'est une chose, mais la garde à vue et le comportement de la police et des journalistes, c'en est une autre. Contrairement à ce que pense ce procureur, cela peut provoquer un suicide. (Dans un autre cas, pour disculper les responsabilités de l'Education Nationale, on commence par annoncer que la suicidée est dépressive.)

Aujourd'hui je pense aux collègues de ce prof de Saint-Michel, qui doivent sûrement culpabiliser de ne pas avoir été auprès de lui non-stop à ce moment-là, à son ex-femme que les propos du procureur rendent responsable, et à cet ado, qui a fait une connerie, certes, mais dont les parents, plutôt que d'aller discuter au lycée, se sont précipités à la police. Vivre avec ça ne va pas être facile.

Commentaires

J’allais dire une justice inhumaine, mais non c’est la justice des hommes, pas d’égard et pas de présomption d’innocence, c’est dégueulasse ! Un truc comme ça sur le coin d’la gueule à un moment de fragilité et tu plonges dans l’trou noir, le pousse à la mort des institutions, du système, on peut tous y être confrontés un jour.
Nous vivons dans un monde de relation superficiel, c’est catastrophique.

Écrit par : Vil coyote | samedi, 25 octobre 2008

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Comme tu dis "vivre avec ça ne va pas être facile" mais eux au moins sont encore en vie.

Écrit par : Catherine | samedi, 25 octobre 2008

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@Vil : j'ai jamais aimé plonger... Même à la piscine.
@Catherine : ma phrase devait être mal tournée, c'est au gosse que je pense, à sa culpabilité d'avoir inventé un truc pareil, et qui a la malchance d'avoir des parents qui ne l'ont pas aidé sur ce coup-là. Mais aux parents, je n'y pense avec aucune compassion.
A ce propos, je viens de lire que la mère d'élève qui a agressé une institutrice violemment, elle, n'a toujours pas été interpellée, même pour un simple interrogatoire. Pour peu que l'instit' de 40 ans, nouvellement nommée dans cette école, ait été dépressive une fois dans sa vie, on va dire que c'est de sa faute et qu'elle a attiré les coups !

Écrit par : Ed | samedi, 25 octobre 2008

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"je viens de lire que la mère d'élève qui a agressé une institutrice violemment, elle, n'a toujours pas été interpellée, même pour un simple interrogatoire."

Mais voyons, c'est pour éviter qu'elle se suicide ! Allez, la justice et la police sont moins inhumaines que vous ne le laissez supposer !

Naaan, j'rigole.

S'il est permis de rigoler face aux ravages de la victimolâtrie, de l'émotionnite et de la tolérance zéro.

Écrit par : PMB | dimanche, 26 octobre 2008

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@PMB : on a le droit de rigoler avec tout, si ça fait du bien, et que par ailleurs quand le stress est retombé, on peut redevenir sérieux. Je ne souhaite évidemment pas qu'on arrête cette femme de manière humiliante, ni qu'elle se suicide. Elle a sûrement pété les plombs, ou est incapable de se gérer socialement pour des bonnes raisons, mais je constate simplement que l'attitude face au personnel de l'éducnat est différente...

Écrit par : Ed | dimanche, 26 octobre 2008

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Tu as raison sur le fond, Ed, mais on ne parle pas non plus de ces profs qui sont accusés à tort et qui tiennent le coup, donc il n'y a pas de suites judiciaires ni médiatiques; de ces profs qui sont coupables et dont le Rectorat étouffe les affaires grâce à des radiations définitives; des parents censés qui te poussent pas l'inconscience jusqu'à débarquer au poste de police, etc...
Il y a mille facettes dans ces histoires -ou ces non-histoires d'ailleurs-, et il est difficile d'en comprendre les tenants et les aboutissants.
Etre prof n'est pas gage de moralité, ni d'intelligence, ni de compétence, ni d'honnêteté...
Il y a des pourris (je suis polie) et des innocents partout.

Écrit par : Virgibri | dimanche, 26 octobre 2008

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@Ed : ma note n'a jamais eu l'intention de dire que les profs ne sont jamais coupables. Il y en a en taule et qui le méritent, d'autres qui ont effectivement été "mutés", mais quand il s'agit d'une faute professionnelle qui n'a rien de criminel, n'est-ce pas normal ? Une sanction interne peut faire réfléchir quelqu'un et modifier son comportement. Certaines fautes ne sont d'ailleurs que des erreurs. Ce qui me choque, c'est la plainte qui se fait de plus en plus systématique et le comportement de la police avec ces gens en garde à vue. C'est une épreuve traumatisante que je ne souhaite à personne.

Écrit par : Ed | dimanche, 26 octobre 2008

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@ Virgibri
"mais on ne parle pas non plus de ces profs qui sont accusés à tort et qui tiennent le coup, donc il n'y a pas de suites judiciaires ni médiatiques"
=> en effet, je ne suis pas prof mais instit, et quand notre supérieure hiérarchique nous dit: "soyez plus intelligente qu'elle (la mère d'élève accusatrice), laissez glisser", on sait qu'on devra se dépatouiller seul-e pour reconquérir en vrac une réputation/l'envie de bosser/celle de supporter son garnement/le respect de soi-même de ne pas pouvoir ou savoir se défendre/la santé morale et psychique, voire physique etc...

Pour ceci "Etre prof n'est pas gage de moralité, ni d'intelligence, ni de compétence, ni d'honnêteté..."
=> même si le fond est exact, je serais curieuse de savoir quelle proportion d'enseignant-e-s, par rapport à la population générale, est capable d'avoir des gestes ou des mots déplacés face à des ados/enfants, le tout en tenant compte de l'effet de contexte: les enseignant-e-s ont des contacts avec les jeunes générations quantitativement plus importants que le reste de la population.
Quant à la moralité de qqun, tant qu'elle n'affecte pas son métier, elle lui reste personnelle.
De même pour son honnêteté.
Seule la compétence, dont la compétence relationnelle dans le champ de l'éducatif, devrait être un critère de jugement.
...
Je suis ok avec ce qui a été dit plus haut: le comportement de Rambos de la police, la plainte de plus en plus systématique (tiens, je me suis commandé le bouquin de M.Gauchet, voir là
http://www.hesed.info/article-23964655.html ),
le dévoiement de la parole des enfants/ados, qui devient pour eux une arme contre qqchose ou qq un-e qui les dérange, mais aussi un facteur du culpabilité possible ensuite...
Le phénomène social autour de la parole des enfants n'a pas fini de poser question: globalement, nous ne savons pas encore comment faire avec, oscillant entre prise en compte totale sans interrogation, parano générale et rejet (soit déni soit dénégation)...
A vrai dire, ça se remarque tous les jours; on sait que l'enfant jeune a une perception du temps, et des échelles de valeurs différentes de celels des adultes, on sait aussi qu'il met derrière ses mots, assez souvent d'autres choses que ce que les adultes y entendent, on sait enfin qu'un enfant entre toujours dans le désir de son/ses parents et fera en sorte de leur apporter ce dont eux ont inconsciemment besoin pour se sentir parents, que ce soit du conflit, de quoi s'inquiéter ou justement le contraire.
De fait, ça nous donne tous les jours des propos et comportements à traduire aux parents, pour autant qu'ils veuillent bien nous faire confiance (je parle de préélem, puisque c'est là que j'exerce), confiance qui est battue en brèche tous les jours.

Pour illustrer: une anecdote d'il y a 12 ans environ, désolée si je me répands.
Une petite de PS (petite section, 3 ans) dont j'avais eu l'aînée en GS (grande section 5 ans) l'année précédente avait un comportement réservé, plutôt solitaire, avec une grande capacité d'observation et d'apprentissage, mais toujours dans le silence.
Ce genre de comportement n'est pas rare, il devient questionnant quand il perdure 'trop' ou s'aggrave.
L'équipe enseignante et municipale (les atsem) avait l'oeil donc, mais ne s'inquiétait pas trop, d'autant que la famille, soudée, mère et père attentifs, niveau d'implication dans l'éducation des enfants excellent, capacité à laisser vivre aux enfants leurs propres expériences, nous semblait, pour la connaître de longtemps, tout à fait à l'écoute des enfants.
Sauf qu'un jour à la cantine, la petite dit: "oui avec mon papy, quand il fait la sieste, il se met en slip et nous on peut jouer avec sa saucisse".
Surprise déjà, la petite parlait, pour une fois.Ca devait être important, pour elle, donc.
L'animatrice de cantine qui a reçu cette parole était très jeune et peu avertie, s'est mise dans tous ses états, bref, ça a mis toutes les adultes de l'école en révolution.
Entre instits, plutôt perturbées par la chose, vous imaginez, nous avons réfléchi pour savoir dans quelle mesure il fallait ou non prendre ces mots pour ce qu'ils disaient et donc alerter les instances ad hoc immédiatement, ou s'il y avait autre chose en dessous et que donc prendre le temps de voir venir se défendait: c'était un vendredi, et d'ailleurs ça nous a tarabustées tout le week end, de savoir que faire ou pas faire, mais nous avons demandé à l'animatrice de se taire, aux atsem de même, de ne référer à personne, que nous, enseignant-e-s prenions ça sous notre chapeau, et on voit lundi.
Nous avons fait avec notre flair/notre expérience.
Je ne sais pas si, maintenant, dans la même situation, nous n'aurions pas immédiatement alerté de peur de passer à côté d'un truc et que ça nous soit reproché.
Prenant contact avec la sœur aînée, sans en référer aux parents, et juste en discutant avec elle le midi, nous avons eu le fin mot de l'histoire: papy siestait en slip certes, mais prêtait pour un temps de jeu son petit traversin miniature qui lui calait la nuque à la sieste, avant de s'y rendre.
Ce traversin étant nommé saucisse dans le folklore grandpaternel. Et ce moment de jeu était fort prisé de la petite.
Et voilà comment la parole apparemment inquiétante d'une enfant dont le comportement nous questionnait un peu (alors qu'il s'agissait juste de son tempérament) aurait pu déclencher des trucs gravissimes ...

J'ai d'autres anecdotes où justement, ce fut grave, où il fallu réagir vite...

Écrit par : mebahel | dimanche, 26 octobre 2008

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@mebahel : c'est long ton com', effectivement ! (mais en tant que bavarde, je comprends), mais c'est parlant. Oui, je trouve que la précipitation est souvent plus nocive que positive, et pas seulement dans la dénonciation à la police.

Écrit par : Ed | dimanche, 26 octobre 2008

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Les moutards c'est comme les chats, faudrait les noyer à la naissance et laisser les vieux s'entretuer.
On respirerait enfin.
Youououpiiiih !

Écrit par : Pascale | lundi, 27 octobre 2008

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@Pascale : t'as ben raison !

Écrit par : Ed | lundi, 27 octobre 2008

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Comme d'hab"...

Écrit par : Pascale | lundi, 27 octobre 2008

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@Pascale : faut ben l'admet' !

Écrit par : Ed | lundi, 27 octobre 2008

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Désolée :(

Écrit par : mebahel | lundi, 27 octobre 2008

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@Mebahel : t'as pas à être désolée. J'étais d'accord avec quasiment tout ce que tu disais, et c'était moi qui étais désolée de ne pouvoir répondre en détail... Les mi-trimestres me trouvent de plus en plus épuisée.

Écrit par : Ed | lundi, 27 octobre 2008

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Un peu de lecture …

http://www.darmian.net/article-24103766.html

Écrit par : La Dame de Nage | lundi, 27 octobre 2008

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@La Dame de Nage : merci pour cette lecture. On se sent moins seul... Mais hélas, c'est si vrai qu'on est en train de tuer la République, en commençant par son école.

Écrit par : Ed | mardi, 28 octobre 2008

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