BA OU MA ?

Hier nous sortions du magasin. Un SDF, jeune, l'air pas mal déjanté, nous aborde. Je ne comprends pas vraiment ce qu'il nous demande, mais j'ouvre mon sac à main, prête à prendre une pièce. Alors il me dit non, assez autoritairement et montre avec un sourire ce qu'ADMV a dans la main, et sur lequel elle vient de s'extasier : le nouveau chewing-gum Oliwoude sans sucre, dont le goût dure parait-il plus longtemps... à la pastèque ! Je le préviens, « c'est à la pastèque ! » mais il prend le chewing-gum avec moult mercis. Dans la voiture nous mâchons pour la première fois le fameux chewing-gum. Et là, j'ai vraiment l'impression de ne pas avoir fait une bonne action. De retour à la maison je réalise que j'avais oublié mon porte-monnaie sur la table. Pas de regret pour la pièce, donc. Mais la prochaine fois, si je le recroise, je m'excuserai, et s'il me redemande un bonbon, je lui offrirai une bouteille d'eau minérale avec.

C'est tout pareil finalement

Quand je fais la cuisine, je ressens des impressions proches de celles qui m’envahissent quand je peins. Il y a dans ces deux activités pas mal de similitudes. Hier en malaxant mon pain de viande dans lequel j’avais intégré des éléments variés et odorants, j’ai pensé aux photos des mains du potier publiées chez Telle. Pour cuisiner, comme dans les arts plastiques, il y a plusieurs étapes. On suit d’abord une recette, comme on essaye d’appliquer les consignes du maître, puis, on s’en libère et c’est une véritable phase de création. Et quand je prépare un plat je pense à ceux à qui je vais provoquer du plaisir, en tous cas c’est ce que je souhaite, de même que quand je peins c’est presque toujours en pensant à quelqu’un à qui un jour, s’il est réussi, j’offrirai le tableau. Une ligne ou une couleur peuvent faire ressurgir des images du passé,  tout comme un parfum, un fumet, un goût. Certaines recettes sont longues à réaliser mais procurent dans ce cas un long moment de disponibilité d’esprit, et le rendent aussi libre que quand on s’exprime sur le papier ou la toile. Avant de décider si l’œuvre est terminée, il faut l’observer avec un peu de recul, et, si elle manque, ajouter la tache de rouge, même minuscule, qui apportera la vie : une touche de peinture, une rondelle de tomate. La cuisson, c’est un peu comme le séchage, le repos après le bouillonnement, et cela envahit la maison. Le moment que je savoure, c’est le moment où je l’offre. Dégustation en groupe ou en privé. Du plaisir et des souvenirs.

 

Je crois que tout ceci m'est venu à l'esprit après avoir vu Dialogue avec mon Jardinier, de Jean Becker.

(Illustrations : La peinture :

http://galienni.typepad.com/plastikblog/2005/02/citation_illust.html,

 le malaxage :

http://aubainmarie.canalblog.com/archives/2005/09/02/inde... )