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jeudi, 18 septembre 2008
Grandir, c'est pleurer beaucoup.
Ce matin M. était morose. Il a peu participé alors que depuis le début de l'année il me montre, ainsi que son groupe de 4 copains qu'ils sont heureux de me retrouver après la coupure de la première. En seconde j'étais leur prof principale. Ca crée des liens. Je les ai sûrement engueulés, secoués, mais aussi encouragés. Je leur ai répété les mêmes conseils 20 fois, leur ai organisé leur travail de manière directive comme je sais le faire quand j'ai une classe de 35 dont le niveau n'est pas bon. Mais cette année, c'est différent. Ils sont 20 seulement dans le groupe. La loi l'exige maintenant pour les groupes de langues en terminale. Et ils ont mûri. M. qui passait son temps affalé sur sa chaise à dormir en seconde, participe, me regarde dans les yeux, me sourit, est volontaire pour le cours de méthodologie qui est pourtant normalement réservé aux LV2. Bref, il est en passe de devenir adulte. Mais que l'on soit ado, presque adulte, ou carrément vieux, il y a des jours où un truc nous met dans le désespoir. Cet après-midi il est arrivé pour le cours de méthodo, où je n'ai que 4 élèves, en larmes. Au début, je n'étais pas sûre. Mais je l'ai vu, des larmes plein le visage, reniflant sans cesse. Sa voisine lui a passé un mouchoir. Je lui ai proposé de sortir, d'aller à l'infirmerie ou simplement respirer un peu l'air de dehors. Mais il m'a dit "non, il n'y a rien à faire." On a fait cours à côté de lui. Je l'ai senti se calmer un peu, la tête posée dans ses bras sur la table. A la fin du cours, je lui ai proposé d'en parler, car je n'avais pas cours tout de suite. Mais il m'a dit :"Non, il n'y a rien à faire." "C'est un problème familial ?" "Non." Je n'ai pas posé d'autres questions. Après tout cela ne me regarde pas. Enfin, il a le droit de le penser. Mais je l'ai regardé sortir de ma salle en me disant que je suis bien inutile parfois.
18:40 Publié dans Emotion, Humeurs, J'suis quand même un peu prof..., petits détails qui n'échappent pas | Lien permanent | Commentaires (18) | Tags : vive la vie, blog de femme, lycée, spleen
Commentaires
C'est la vie on ne peut pas toujours faire pour les autres, il faut l'accepter sans culpabiliser.
Écrit par : Vil coyote | jeudi, 18 septembre 2008
Répondre à ce commentaireIl y a des fois où l'on aimerait bien pouvoir les aider. Parfois le fait de poser la question, même s'ils n'y répondent pas, leur montre qu'ils ont quelqu'un éventuellement sur qui s'appuyer. Mais que c'est frustrant !!
Écrit par : BBK.mel | jeudi, 18 septembre 2008
Répondre à ce commentaire@Vil : je ne culpabilise pas. Je constate juste les limites de ce que je peux ou ne peux pas faire pour mes élèves. Ca m'a quand même un peu retournée toute cette heure à parler de l'analyse de document à côté de quelqu'un en souffrance. Ca doit être ça qu'on appelle l'empathie.
@BBK.mel : J'espère, oui, qu'il a senti ce que tu décris. Et peut-être que lundi il pourra m'en parler plus sereinement, ou simplement me sourire.
Écrit par : Ed | jeudi, 18 septembre 2008
Répondre à ce commentaireOui et ça fait grandir tout l'monde.
Écrit par : Vil coyote | jeudi, 18 septembre 2008
Répondre à ce commentaireBoulique, le message du jour...
Je vais aller boire une bière pour oublier...
Écrit par : Madame D. | jeudi, 18 septembre 2008
Répondre à ce commentaire@Vil : ça me met à chaque fois en colère. Je me dis. Y'a donc pas moyen de grandir autrement ?
@Madame D. : Le trauma de la journée. Pas pu m'empêcher d'en parler. Bonne bière quand même.
Écrit par : Ed | jeudi, 18 septembre 2008
Répondre à ce commentaireOn ne peut parfois rien face à la détresse des autres, et pourtant, juste poser la question, savoir que quelqu'un s'est inquiété de ce qui se passait, c'est déjà beaucoup...
Écrit par : zapette | jeudi, 18 septembre 2008
Répondre à ce commentaire@zapette : Parfois, sur le moment, on se dit quand même que ça ne suffit pas. La seule chose positive dans cet évènement, c'est que voir un mec de 17 ans et demie chialer, et trois filles faire cours sans un sourire, ni une gêne apparente, très respectueuses de son chagrin en fait, c'est un truc que je n'aurais pas vu quand j'étais moi-même ado. Il y a donc bien eu évolution, et dans le bon sens.
Écrit par : Ed | vendredi, 19 septembre 2008
Répondre à ce commentaire"...en me disant que je suis bien inutile parfois."
Et savoir quand on est inutil et quand on doit rester inutil et pas forcer les choses, c'est aussi un talent.
Écrit par : SilverTiger | samedi, 20 septembre 2008
Répondre à ce commentaire@SilverTiger : :-) Merci de me rassurer.
Écrit par : Ed | samedi, 20 septembre 2008
Répondre à ce commentaireBen oui, c'est généralement les coups durs qui font grandir mais pas forcément, moi par exemple j'ai commencé à grandir un peu quand j'ai rencontré Agnès...
Écrit par : Vil coyote | samedi, 20 septembre 2008
Répondre à ce commentaireT'aurais dû insister, mais bon c'est ma méthode buldo.
ça se trouve c'est un chagrin d'amour : y'a pas pire à cet âge là. Et souvent à leur âge, les adultes ont tendance à minimiser les histoires d'amour, mais bon c'est mon côté sentimentalo.
Enfin évidemment que si, peut y avoir pire mais bon quand t'auras vu "La belle personne" tu verras que des fois y'a pas pire !
Écrit par : Pascale | samedi, 20 septembre 2008
Répondre à ce commentaire@Vil : ouah ! ça c'est beau ! Je devrais lui dire à mon élève. là t'en chies, mais un jour tu rencontreras le grand amour et tu grandiras vraiment.
Écrit par : Ed | samedi, 20 septembre 2008
Répondre à ce commentaire@Pascale : j'y ai pensé, au chagrin d'amour, tu parles ! Je suis la championne des chagrins d'amour. Mais Ed est pudique et respecte la pudeur de ses élèves... Alors j'ai rien demandé. Parce que, si effectivement il s'est fait plaquer, je ne vois pas ce que je pourrais faire !
Écrit par : Ed | samedi, 20 septembre 2008
Répondre à ce commentaireComment peux-tu dire "inutile" ? il n'avait sans doute pas envie de se confier à ce moment-là mais il a senti que tu t'inquiétais pour lui, que tu étais là, disponible, au besoin.
Et ça, c'est inestimable !
Écrit par : telle | samedi, 20 septembre 2008
Répondre à ce commentaire@Telle : merci. c'est l'impression d'inutilité qui me plombait ma soirée le jour où j'ai rédigé cette note. Avec le recul, tu as sûrement raison...
Écrit par : Ed | dimanche, 21 septembre 2008
Répondre à ce commentaireComme c'est désagréable comme situation... Mais je pense que tu as fais ce qu'il fallait, je ne vois pas ce que tu peux faire d'autres.
Prévenir la vie scolaire et l'infirmière ensuite, pour être sûre que ça n'aille pas plus loin...
Écrit par : cpechou | vendredi, 10 octobre 2008
Répondre à ce commentaire@cpechou : oui ces gens là sont efficaces dans mon bahut, mais on ne les trouve pas toujours tout de suite... Et parfois je préfère ne pas ébruiter un évènement très ponctuel, ça peut nuire à l'élève aussi. J'ai pu voir qu'une réputation se faisait vite. En tous cas il va mieux, et me sourit de nouveau. Je penche donc pour une rupture. Mais qu'est-ce que ça fait mal à cet âge là, et après aussi d'ailleurs !
Écrit par : Ed | samedi, 11 octobre 2008
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