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vendredi, 17 juin 2016

L'ordinaire du bac

Baccalauréat. Épreuve de philo. 14 juin. Il pleut. Normal. Entrée dans la salle : Enseignants/surveillants, 7h30. Candidats, 7 h 40. "Prenez ce dont vous avez besoin pour écrire ; laissez vos convocations et papiers d'identité en vue, mais rangez tout le reste dans vos sacs, en n'oubliant pas d'y mettre votre téléphone portable ÉTEINT. Puis posez votre sac au fond de la salle contre le mur. Euh, s'il vous plait, asseyez vous du côté de l'étiquette." Dans le couloir, j'ai vu qu'il y avait café, thé et mini-croissants over-réchauffés. "Non, ici, c'est la salle 10, pas 12. " Pas d'absents. Chic ! Moins de choses à écrire sur le P.V. de l'épreuve. Pas de "copie d'absents" à remplir. On se réjouit de peu de chose en ce monde de 2016. Au tableau j'ai écrit tous les éléments de l'en-tête de la copie. Sauf le numéro du candidat. "M.........." . Une candidate demande quand même : "Le numéro, c'est celui-ci ?" "Non, celui-ci, comme c'est indiqué, c'est votre identifiant national. Il vous servira toute votre vie. Le numéro du candidat, commençant par M, comme au tableau, il ne vous servira que pour cette session de bac." Presque tous les sacs sont posés. Un garçon lit encore une page d'un petit livret. Je m'approche. Il révise le désir. Comment l'interrompre !? Vérification des papiers et convocations. Je prends le temps de lire le nom du lycée d'origine des candidats. Il y a une candidate libre. 7h55, le proviseur apporte les sujets. Heureusement que j'ai une paire de ciseaux sur moi. Il a beau me montrer une petite languette à déchirer, censée résoudre mon problème, la conclusion, c'est que l'inventeur de cette languette est le même que celui de l'ouverture facile de ma truite bio de chez Carrouf. Hors de la lame, point de salut. Mon collègue est prof de philo. Curieux, il regarde le sujet, pendant que je note le repère de l'épreuve au tableau. Bien lui en a pris, car une fois les sujets distribués, il n'en reste pas un seul pour nous. Qui a dit que la fonction publique gaspillait ? A 8 heures pile, les élèves retournent la feuille et découvrent ce sur quoi ils vont penser pendant 4 heures. Le garçon de tout à l'heure doit se réjouir ! Cette première mise en route s'est  passée avec plus de calme, moins de bavardages et ricanements nerveux que les autres années. L'ambiance est presque lourde. Dans ma tête en tout cas, elle l'est, lourde, l'ambiance. A peine une centaine de personnes pour se recueillir après l'assassinat de 49 homosexuels et 2 policiers. Au réveil j'ai entendu que l'assassin avait reçu ordre de tuer des mécréants. Et lui, qu'était-il ? A 9h05 je vais boire mon premier café, accompagné d'un croissant moins décevant qu'il le semblait. En revanche, j'ajoute de l'eau dans mon café, car l'expérience dans ce lycée, 21 ans !, m'a démontré que sinon, il est imbuvable. A 9h50 je vois apparaître ma collègue-copine sur le palier, alors je bois mon deuxième café, mais sans croissant. L'impression d'ambiance plombée est partagée. On chuchotchatte de tout et de rien, puis je reviens à mon poste. Mon collègue de philo veille et du palier on voit la moitié de la salle. Pour ne pas avoir l'impression de perdre son temps pendant les 4 heures, mon collègue lit, par intermittence et en prenant des notes, Spinoza. Moi, en levant les yeux à la fin de chaque page, je déguste "Une année au lycée, Guide de Survie en Milieu Lycée" de Fabrice Erre, chez Dargaud, une BD qui existe aussi en blog. Je suis en train de me remuscler les lèvres à force de retenir des éclats de rire. Le premier volume surtout est excellent. Je serais curieuse de savoir si ça peut faire rire quelqu'un qui n'est pas prof. De temps en temps un doigt se lève pour une feuille rose, une feuille verte, une copie ou pour aller aux toilettes. A partir de 10 h : "Excusez-moi, mais pour numéroter les pages, c'est 1 copie : sur / 4, 2 copies  : sur / 8, etc, comme je l'ai écrit au tableau." "Ah oui, désolé(e), j'avais pas vu." 20 candidats, 18 fois ce dialogue. Et je ne vous parle pas du remplissage de l'en-tête. Non, je ne vous en parle pas.

Ca s'est plutôt bien passé. Pas de malaise, de tricherie avérée, pas d'alerte incendie ou attentat.

mercredi, 22 juin 2011

La grande supériorité de l'examinateur est de se trouver du bon côté de la table*

Tous les ans je suis là, 4 heures, voire 5, trois fois au moins. Tous les ans ils se rongent les ongles, mangent des galettes st-michel ou des granolas, font tomber leurs cheveux devant leurs yeux jusque sur le papier. Tous les ans leurs chaussures sont le reflet de la mode adolescente du moment. Les ballerines et les converses perdurent. Elles sont humides cette année. Tous les ans, que les cheveux soient coupés ras, frisés, attachés ou non, colorés ou naturels, ils et elles se concentrent, se tordent, s'appliquent, essayant soit de valider le travail régulier d'une année, soit, dans un dernier élan, après avoir bachoté comme des fous pendant une semaine, de prouver qu'ils peuvent déchirer leur race et l'avoir ce putain d'bac. Hier (oui, j'ai écrit ce texte mardi) c'était l'épreuve de langue vivante 1, un peu comme une récré entre philo-Histoire/Géo et SES-Maths. C'est vrai, c'est même pas la honte de n'avoir rien compris : c'est dans une langue étrangère, et les vieux sont encore plus nuls qu'eux. Pas comme en maths ou en sciences-éco. Les pères se feront un plaisir de leur dire que c'était facile, qu'ils auraient dû faire ça, démontrer ça ou parler de ça. Tous les ans pendant que nous speedons comme des malades pour corriger nos 64 copies (110 en philo !) ils s'angoissent, extrapolent, consultent les corrigés sur le web, recherchent les listes de textes oubliées et froissées au fond du sac Eastpack depuis le dernier cours. Ils s'imaginent qu'ils ont raté, exorcisent leurs peurs en rédigeant des statuts provocateurs sur facebook. Tous les ans ils viennent aux résultats blêmes, tremblants ou grandes gueules, puis s'effondrent de rire ou de pleurs, hurlent, ravalent leur déception. Et tous les ans je suis là et je n'arrive pas à me retenir de pleurer. Et tous les ans, je vous écris une note sur ce fameux bac dont on dit tous les ans qu'il va disparaitre, et qui reste.

*Edouard Herriot

 

mercredi, 16 juin 2010

UNE FIN EST SOUVENT UN DEBUT

Depuis trois jours je cours. Cela pourrait être bon pour la santé, mais sans le stress qui va avec. Aujourd'hui, malgré tout ce fut plus cool (un passé simple spécialement dédié à Imposture !). Car si réunion il y a eu, elle fut entrecoupée d'un apéro et d'un repas fort agréables, et plein d'émotion, car les baby-boomers prennent leur retraite. Et un autre, plus jeune, a décidé de passer du côté obscur de la force (comprendre : il devient chef d'établissement). Il y a des mots qu'on se dit ces jours-là qui vous font verser une larme.

Avec mes collègues d'anglais on a été moins émus, mais efficace. On a choisi un nouveau manuel, parmi des titres qui en français donnent "cible, impact, mission...". A croire qu'enseigner l'anglais est une guerre. Et on s'est réparti les classes. Neuf personnes, pas un coup de gueule. Elle est pas belle mon équipe ?

Et voilà, c'était mon dernier jour avant le bac, et en même temps, le premier de l'année prochaine.

Post-scriptum : A la caisse du supermarché, Dawson et Montgomery, jumeaux de deux ans et demie ont semé un beau souk ! (Si, si, je vis en France.)

lundi, 07 juillet 2008

Je suis dans un cybercafé

L'Educnat va me rembourser un aller-retour et un repas pour ... RIEN. Aucun élève n'a choisi anglais. Ils ont beau être scientifiques, ils n'en sont pas pour autant spécialistes en algèbre et un point de plus coeff 6, ils n'ont pas saisi que ça faisait moins que 6 points de plus coeff 3. Ils n'ont pas non plus eu assez de sept années de secondaires (au moins !) pour découvrir que les profs d'anglais étaient plus cools que les profs de maths ou SVT... (Je sens que je vais me faire des amis !) Donc je me suis levée à 6 h 2O, j'ai roulé 15O bornes, et la même chose demain, pour ne voir personne, et assister impuissante aux délibérations d'après oral dit "de rattrapage". Pour décompresser de cette journée perdue dans un lycée sinistre et laid, je suis venue en centre ville, avant d'aller passer la soirée chez ma cousine (chic, on va boire un coup et pipeletter !) et j'ai trouvé un cybercafé, grâce auquel vous avez quand même une note aujourd'hui. Ce matin, j'ai traîné un peu aussi et me suis acheté "Entre les Murs", le livre, que j'ai dévoré aux trois quarts, en me marrant souvent. Donc tant pis pour l'educnat, bien malgré eux, j'ai rentabilisé ma journée, na !