On est bien d'accord...

16 heures........................21 heures.

31 parents, une moyenne de 10 minutes par entretien. Prof principale d'une classe, juste prof d'anglais de l'autre. Heureusement qu'on est assis. Pas eu le temps de pisser, ou de grignoter, ni de souffler d'ailleurs. Ce fut du non-stop jusqu'à ce que, ô miracle !, le couloir soit vide après le 31ème.

Il n'y a eu ni fâcherie, ni pleurs, seulement des sourires et des phrases du genre : "Merci de me recevoir. Passez de bonnes fêtes. Ce soir je n'ai rencontré que des profs ouverts d'esprits. Moi, j'aimerais qu'elle fasse S, mais je ne l'obligerai jamais à faire quelque chose qui la rende malheureuse. Il passe du temps devant ses devoirs, mais ce qu'il fait exactement... Elle travaille, mais elle ne sait pas être efficace. Faut qu'il reste dans votre lycée, il s'est fait des bons copains ! Vous croyez que les cours particuliers ça sert à quelque chose ? Ma fille se sent très bien au lycée. C'est la grande liberté, la seconde !"

Et moi de répondre : "Merci. Je vous en prie. Avec 10 en maths, c'est quand même un peu juste. Reste toi-même, en tous cas, même si certains ne supportent pas qu'on ne soit pas bêtement comme eux. Internet, c'est bien, mais il ne faut pas en abuser. Et les copier/coller, on sait les détecter, tu sais ! Vous avez vu les conseils méthodologiques qu'on leur a distribués ? Oui, bien sûr, au lycée ils peuvent imprimer, mais uniquement si cela a un intérêt pédagogique. Un élève qui n'écoute rien en cours et attend que ça se passe, ne mérite pas qu'on lui paye des cours. Dans la classe, il y a une bonne ambiance, parfois trop bonne..."

S'il n'y avait pas eu les courants d'air, la soirée aurait été parfaite. Un bon crû, vraiment.

Et au retour, ADMV m'attendait à la maison.

Mon 20 novembre à moi

Je voudrais tout d'abord compatir avec tous ceux pour qui cette journée du 20 a été insupportable, exécrable, niquée. Car pour moi, pour être honnête, ça a été une très bonne journée.

Tout d'abord, grâce à la grève des cheminots, c'était le bordel à la gare, et ADMV a choisi de rester une journée de plus à la maison, plutôt que de galérer dans les transports pour une journée non rentable. Et la rentabilité, de nos jours, c'est le maître-mot ! Elle rattrapera sa journée une autre fois, vlà tout ! 

Y'a un truc qu'il faut que je vous dise, pour ceux qui l'auraient pas encore compris, je souffre de cette maladie honteuse, enfin, j'en conclus que c'est une maladie honteuse à force d'écouter les media d'"information" et les blogs, je suis syndiquée. Rassurez-vous, ça ne s'attrape pas, et ce n'est pas si affreux à regarder qu'on aimerait souvent le faire croire.

Donc, je devais envoyer à mon syndicat, les premiers chiffres des grévistes dans mon lycée à 9 h 30. Je ne sais pas si le personnel non gréviste est particulièrement nul en arithmétique ou faisait preuve de mauvaise volonté, mais je n'ai pas réussi à les obtenir. "Pas encore calculés" qu'elle a dit la secrétaire à 9 h 40 ! Bref, pour ne pas arriver en retard à la manif, je suis partie en vélo. Manifester à vélo, c'est cool, ça fait un appui pour la vioque que je suis, mais c'est pas aisé de se faufiler dans la foule, donc, pour parler aux autres, il faut attendre qu'ils viennent à vous. On était nombreux, pas la giga manif, mais honorable. Mon papa me disait toujours que le bon dieu était laïc et de gauche, car il faisait toujours beau les jours de manifs d'enseignants, et il aurait eu raison hier encore, il ne s'est mis à pleuvoir quelques gouttes que juste après la dispersion ! Je me suis sentie bien pendant ces deux heures : Entourée de gens motivés, qui m'ont montré que je n'étais pas la seule à croire encore dans le service public. (A propos du lavage de cerveaux organisé par les journalistes, les Guignols dimanche dernier nous ont offert une analyse très pertinente. Elle n'est pas encore sur dailymotion ou youtioube, dommage.) J'ai marché un moment avec mes vieux potes de mes débuts dans l'educnat. Ils sont toujours là, ils changent pas. J'ai bavardé avec ma copine de sixième, qui est devenue prof de musique, et qui a été ravie que je lui envoie la vidéo du mammouthophage. J'ai croisé un jeune stagiaire du lycée, qui, lui, ne croit pas aux rumeurs que si on fait grève, on n'est pas titularisé. Les jeunes ! ça, c'est que de l'intox, pour se justifier de ne pas faire grève. Je ne connais aucun prof qui ait été pénalisé en aucune manière d'avoir fait grève. Sinon, il y a longtemps, que j'aurais eu un blâme ! J'ai attendu quelques temps sur le côté pour voir passer les étudiants qui nous avaient rejoints, et j'ai eu un sourire en reconnaissant des visages qui étaient dans mon lycée l'an dernier ou l'année d'avant. Je les ai trouvés bien sages, à côté du tableau que nous en brossent les media. Bien sûr, ils chantaient, criaient et allumaient des fumigènes, mais uniquement des roses et des verts, et c'était très joli dans ma ville grise.

A midi et demie, ADMV m'a rejointe en vélo, et on a été au restau. Quitte à perdre du fric, on se fait la totale ! On a levé nos verres à cette belle manif. L'après-midi j'ai bossé, mais avec du baume au coeur, l'impression d'avoir accompli mon devoir.

Voilà, Aleks, je te l'ai racontée, ma manif. Cadeau pour tes 18 ans !

Fait pô bô

Non, je ne vais pas parler de météo, enfin, pas que.

Il fait gris et humide, mais pas assez pour m'empêcher d'aller manifester. Voilà pourquoi :

"L'enseignement sera le plus touché par les coupes dans les effectifs de fonctionnaires en 2008 avec 11.200 suppressions de postes, principalement dans les collèges et lycées." (Lu dans Yahoo actualités ce matin)

Toutes les classes de secondes sont à 35 dans ma ville. On finit par se réjouir quand ils sont malades pour qu'on puisse bosser correctement !

Ah oui, et puis au dernier CA de mon lycée j'ai appris que grâce à la décentralisation, le prix de la cantine allait augmenter, mais pas le montant de ce qu'il y aurait dans l'assiette. C'est cool, ça va faire baisser le nombre de Demi-pensionnaires, et raccourcir la file d'attente...

Je ne veux pas finir fonctionnaire minoritaire, entourée de vacataires et contractuels qui ne pourront qu'obéir à des réformes anti-pédagogiques.

Bon, je ne vais pas faire une liste de ce qui ne va pas et de ce qui m'inquiète. Ca vous ferait sûrement ch... . Mais ce sont quand même vos impôts... et vos enfants.

Le monde de l'Ioufme

Demain je passe une journée complète, (de 9 heures à 16 heures) à l'Ioufme. Il y a longtemps que cela ne m'est pas arrivé, car pour la formation continue, qui dans mon académie offre encore quelques stages intéressants il faut le dire, je choisis toujours des modules qui m'ouvrent sur "autre chose" que ma matière. Je veux apprendre, mais pas forcément pour rentabiliser en cours, je ne cherche pas une technique ou une recette, mais de quoi m'étonner, et me donner envie de donner envie à mes élèves de découvrir l'apprentissage autrement. Depuis mes débuts en tant que prof, j'ai fait des stages de théâtre, de mise en scène, de réalisation de documents vidéo, d'informatique, de lettres-vidéo, de formatrice en vidéo, d'art vidéo, d'initiation à l'art contemporain, et j'ai même fait des universités d'été, ou des stages en Grande-Bretagne et aux USA. S'inscrire, depuis qu'on doit passer par internet, est un peu devenu le parcours du combattant, mais ça en vaut la peine.

Demain, c'est différent, je suis convoquée, sans l'avoir demandé, et ça risque d'être moins "bandant" comme dirait Pascale... Je vois d'ici les intervenants habituels en didactique, dont certains sont sympas, mais enseignent peu ou pas en lycée ou collège et ont perdu le sens des réalités du plein temps avec les élèves, et d'autres visent tellement la place du calife qu'ils en ont le discours, le ton, et le reste... Ceux-là m'ennuient. Dans deux ou trois ans ils viendront dans ma classe et critiqueront ce qu'ils y verront sans avoir peur de tenir un discours complètement contradictoire avec celui qu'ils me tiendront demain.

Pour rendre cette journée de mercredi (où je bosse d'habitude, je vous le rappelle, uniquement de 8 heures à 10 heures) j'ai décidé de me rendre dans cet antre de la pédagogie novatrice et européanisante en vélo ! Si j'en ai encore la force, je vous raconterai demain soir dans quel état tout cela m'aura mise.

La vie n'est pas rose pour tout le monde...

Mes secondes ont fait leur premier devoir aujourd'hui !

Si jeunes et déjà consommateurs...

Aujourd’hui c’était une journée que l’équipe de ma classe de seconde organise tous les ans pour mieux se connaître, consolider le groupe, tout ça… Au réveil, bien que France-Bleu m'ait agressée avec une chanteuse qu'ils ont appelée Chimène, moi je dis que c'est un clône de Lara F, j'avais le moral car le temps était au grand bleu.

Ce matin : circuit par équipes dans le centre ville avec des questions variées et ludiques sur l’architecture. La proviseure-adjointe a menacé de remmener son groupe au lycée et de leur donner du boulot en perm’ pour qu’ils se décident à s’intéresser un peu aux questions.

Z'auraient sans doute préféré être devant leur ordi, qu'avec tous ces vieux ringards qui interdisent d'écouter les mp3 et d'envoyer des sms pendant qu'on répond à leurs questions zarbis à deux balles.

A midi : pique-nique convivial. On distribue les sandwiches, fraîchement préparés par le lycée, et au lieu de rester pas trop loin, ils se dispersent, et laissent seul… notre élève handicapé.

Cet après-midi : on traverse le centre pour aller au musée. On croise des élèves du lycée. Une élève, juste à côté de moi : « ils ont de la chance ! Ils n’ont pas cours. » La sortie commençait à 9 h 30 et finissait à 16 h alors que leur horaire normal était 8 h  / 17 h !

Pour info, moi, le jeudi je bosse normalement de 14 à 16 h !

Au moment de démarrer la visite et le boulot dans le musée, ils sont tous affalés sur des coussins dans l’entrée. On appelle un groupe. Personne ne bouge. Un élève : « On est crevé, m’dame. »

Dans le musée, ils ont choisi une œuvre (en l’occurrence une sculpture qui glorifie le sport, j’ai pensé à Pascale…) sur laquelle on leur pose des questions. Dont celle-ci : « Quels sentiments éveillent en vous cette œuvre ? » Réponse : « Supporter ! »

Cette classe se plaindra sans doute bientôt en conseil de classe : "Pourquoi on nous emmène pas en voyage, nous ???"

Bon, y’en a quand même quelques-uns qui ont su apprécier. Pas tous, et pas tout le temps, c’est tout. Demain je leur fais remplir une fiche d’évaluation sur cette sortie. La fiche de tous les dangers…

Il y a encore des endroits où ça se passe bien.

Je colle, je découpe, je customize, pour avoir de beaux cahiers. Je copie des listes de noms, j'imprime des fiches pour mieux connaître mes élèves, des tableaux et des questionnaires pour les aider à comprendre les documents. J'organise et je réserve pour la journée d'intégration de mes élèves de secondes. Je réunionne utile. Je réponds aux emails des jeunes collègues paniqués, des stagiaires inquiets... Voilà toutes les raisons pour lesquelles je n'ai pas pu écrire plus tôt comment se passait ma rentrée.

Le premier contact avec mes élèves de seconde a été plutôt bon, sympa, pas d'énervement. J'ai réussi à écouter le discours de la proviseure, tout distribuer les papiers divers et variés, faire noter l'emploi du temps et faire visiter le lycée, tout ça en deux heures ! L'élève handicapé, pour qui je n'ai pas encore réussi à trouver de pseudo, a eu l'air de se sentir bien, et les autres élèves pas étonnés du tout. Son assistante est discrète et a l'air très sympathique. Il est vachement habile dans la manoeuvre de son fauteuil, et des mains bienveillantes se sont tendues pour ouvrir les portes à son passage.

Il fait beau. J'ai le moral. C'est pas comme ça à toutes les rentrées. Si les éboueurs n'avaient pas oublié de passer ramasser la poubelle jaune des matériaux recyclables, ce serait parfait. Je ne sais pas comment je vais faire tenir tous les cartons et papiers de la semaine qui vient ! Une poubelle de prof, c'est cartonné en cette période de découpage !

Bonne rentrée !

Je souhaite une très bonne rentrée à tous mes collègues demain. Enfin, tous, y'en a je m'en fiche un peu, soyons honnêtes. La rentrée, c'est ça : il y a ceux avec qui on préférerait tchatcher autour d'un café plutôt que d'assister à la séance pléniaire, et ceux qu'on évite, parce qu'ils se croient obligés de vous faire la bise sous prétexte qu'ils ne vous ont pas vu depuis deux mois et que ce n'est pas leur (ni la vôtre) première rentrée dans l'établissement. Ca, c'est pour que Virgibri voie un aspect positif à être TZR et ballottée d'établissement en établissement, elle au moins, n'a à faire la bise à personne !

Ce qui rapporterait du fric, c'est de taxer les dépressions nerveuses dans l'éducnat, pour financer la lutte contre le rhume des fonctionnaires de police en faction aux carrefours ou cachés dans un virage d'autoroute !!

Note de circonstance

Sur le site du « Monde », j’ai lu un article intitulé : Xavier Darcos défend la réforme de l'Education nationale

et datant du 29 août 2007. Je vous en cite et commente quelques extraits.

« 32.000 enseignants sont rémunérés sans classes et sans activités pédagogiques, ce qui représente le poids d'une académie. »

Ces gens souvent « font fonction » de … proviseurs, documentalistes, ou assurent des tâches indispensables (formation, informatique…) pour lesquelles l’Educnat n’a pas prévu de recrutement. Il faut arrêter de faire croire que tous les enseignants qui sont payés à faire autre chose qu’enseigner devant une classe ne font rien.

« Conformément aux promesses de campagne du président Nicolas Sarkozy, les temps d'étude surveillée ou les activités nouvelles après les cours et seront développés, notamment pour les élèves les plus pauvres, a assuré le ministre. »

Ca y est,  le mot est lâché par la droite décomplexée : Il y a des « pauvres ». On le savait depuis longtemps, mais enfin la droite l’admet et prétend même faire des choses pour que ces pauvres puissent vivre… Ils pourront s’éduquer à défaut d’avoir le droit d’être malade et de se soigner.

Qui assurera ces temps d'étude surveillée et activités nouvelles ? Mystère...

« Par ailleurs, le ministère entend développer les activités sportives. Le temps consacré à l'Education physique et sportive (EPS) dans le primaire passera dès cette rentrée de une à deux heures, a annoncé Xavier Darcos. (Voir le commentaire de Sarah ci-dessous à ce sujet !!!) L'objectif pour les collèges et lycées est de doubler la proportion de licenciés. »

Je ne serai pas aussi négative que Pascale quant à cette mesure. Cela me parait positif si ça aide tous les enfants à se sentir bien dans leur corps pour avoir conscience de leurs compétences et d’être bien avec les autres.

L’objectif du "doublement des licenciés" me semble, lui, plus enclin à développer un esprit de compétition qui ne me ravit pas moi non plus. Si je faisais du mauvais humour je dirais que XD a le même objectif en primaire que les patrons dans leurs entreprises.

« Enfin, un enseignement en histoire de l'art sera dispensé dans les collèges, dans le cadre de matières existantes. Les partenariats entre les écoles et les institutions culturelles seront systématisées dans un délai de cinq ans. Les enseignants pourraient prochainement recevoir un "pass" leur facilitant l'accès aux musées et monuments nationaux. »

Si certains musées nous aident en effet, d’autres, comme le Louvre, ont supprimé la gratuité systématique. (On y obtient un pass à l'année uniquement si on réserve une sortie pour une classe. Nous organisons souvent une sortie à deux ou trois professeurs, je me demande si cela donne droit à deux ou trois pass… ) Pour les expos temporaires l’entrée gratuite est encore plus rare. Cela rend la préparation des visites onéreuse, et la met à la charge de l’enseignant. Sans compter qu’à mon avis il est nécessaire à l’enseignant de se tenir informé de l’évolution de l’art, de s’ouvrir sur tous les domaines de la connaissance, et les visites des musées font souvent partie intégrante de notre quotidien. J’ai vu récemment à Paris que le prix d’entrée moyen pour une expo est de 7 euros. Dans le meilleur des cas on obtient une réduction d’un euro ou deux.

Je sais, c'est un peu chiant à lire, mais c'est de la faute à Pascale qui m'a demandé mon avis... Donc si vous en avez envie, en commentaires, vous pouvez ajouter une blague ou deux... ou aller directement à la buvette !

J'allais quand même pas vous imposer la vue du ministre liquidateur de postes !

Ouf !

Au cas où vous ne le sauriez pas encore, c'est bientôt la rentrée. Les media en parlent depuis un mois aussi, en abordant des thèmes trépidants comme : "Comment réhabituer vos enfants à se coucher tôt et se lever tôt, La rentrée ça coûte de plus en plus cher surtout si vous achetez l'agenda Diddle, Le cartable est trop lourd : ah, les méchants enseignants qui se rendent pas compte !!!"

Comme j'ai un ou deux rendez-vous à prendre chez des spécialistes, il fallait que je connaisse mon emploi du temps. Alors j'ai appelé le lycée. Angoisse. Soulagement.

Je ne travaille pas le lundi matin. Grâce à l'heure de première chaire qu'ils n'ont finalement pas supprimée, je donne 17 heures de cours, un peu comme un agrégé qui ferait deux heures sup' (mais sans la paye...) ! Je travaille tous les jours, mais un nombre d'heures raisonnable. Donc ce n'est pas cette année que je vous ferai ma dépression nerveuse !

Ma proviseure adjointe m'a annoncé que dans la classe où je suis prof principale, nous allions accueillir un élève handicapé (ça, c'est déjà arrivé), qui est toujours accompagné d'une assistante (ça c'est nouveau pour moi). Sans vous donner trop de détails qui relèvent du secret médical, j'essaierai de vous tenir au courant.